teaching:biblio-10.1021-ed3002336

Apprendre le concept d’équilibre chimique aux élèves de secondaire

A Teaching Sequence for Learning the Concept of Chemical Equilibrium in Secondary School Education Marco Ghirardi, Fabio Marchetti, Claudio Pettinari, Alberto Regis, and Ezio Roletto, J. Chem. Educ., 2014, 91 (1), pp 59–65 DOI: 10.1021/ed3002336 résumé de J.V. 2014-2015

Cet article prend en compte l’évolution historique et épistémologique du concept, ses autres conceptions et les difficultés d’enseignement, soulignées par des recherches en éducation, ainsi que les procédés d’apprentissage des étudiants et de transmission de la connaissance.

L’équilibre chimique est un concept central et compliqué, considéré comme un des plus difficiles à enseigner. De nombreuses études sur la difficulté des étudiants à conceptualiser l’équilibre chimique font apparaitre diverses incompréhensions : les étudiants ne sont pas capables de distinguer une transformation chimique complète (d’une incomplète), ils pensent que la réaction opposée ne commence que lorsque la réaction directe se termine, ils ne comprennent pas la nature dynamique de l’équilibre. Selon eux, les réactions directe et opposée s’alternent et existent séparément lorsque l’équilibre est atteint, ou bien ces réactions se développent dans des compartiments distincts. Ils pensent aussi que les concentrations des produits à l’équilibre sont égales ou proportionnelles aux coefficients stœchiométriques, et sont incapables de prédire l’évolution d’un système qui doit s’adapter aux changements extérieurs.

Le but de l’enseignant est d’aider les étudiants à apprendre les concepts de base d’une discipline. De nombreuses recherches ont démontré qu’on apprenait mieux lorsque les nouveaux concepts étaient greffés à d’autres déjà connus. Sans cette connexion, la connaissance n’a aucun sens et devient purement mnémotechnique car acquise passivement. Pour enseigner ce concept, il faut prendre en compte les difficultés d’apprentissage et les solutions proposées par les premiers chercheurs, puisqu’il existe des points communs entre leurs idées et les conceptions faussées des étudiants. Ceci peut aider les enseignants à faire comprendre aux étudiants la réelle nature et la complexité du développement de la connaissance scientifique, et à les pousser à analyser le phénomène par eux-mêmes.

Le système a subi une réaction chimique incomplète lorsque la concentration de toutes les substances impliquées (réactifs et produits) est immuable. Les étudiants peuvent expliquer la présence de toutes les substances impliquées comme « étant toujours en train de se transformer, parce que c’est lent ». Pour éviter ce genre de réponses, les élèves doivent absolument comprendre la différence entre les réactions chimiques en progrès, et celles terminées, et entre les réactions chimiques terminées et complètes et celles terminées mais incomplètes (en équilibre).

Une solution aqueuse de chloride d’hydrogène est ajoutée à une solution aqueuse de thiosulfate de sodium. Ce qui donne de la dioxine de sulfure (gaz), une solution aqueuse de chloride de sodium, une précipitation de sulfure (solide) et de l’eau.

Lorsqu’on mélange les deux solutions, du sulfure colloïdale (une suspension jaune pâle) se forme et embrume le système. Les étudiants devaient écrire le schéma de réaction correct, réaliser la réaction chimique, et estimer la fin de la réaction. 93% ont décrit la réaction correctement. 7% ont oublié d’indiquer l’état physique des produits et des réactifs, ou n’ont pas équilibré correctement. Tous les élèves considéraient qu’une réaction était terminée lorsqu’ils ne percevaient plus de changements macroscopiques. Exemple de réponse : « Il n’y a plus de variation de couleur », «  cela se termine lorsqu’il n’y a plus de changement, il reste alors une poussière jaune et opaque ».

Ensuite les élèves doivent représenter un modèle de l’évolution du système, une représentation de l’état initial, pendant la transformation, et lorsqu’elle est terminée. Le but est d’évaluer la possible présence d’une conception compartimentale des réactions chimiques. Une représentation correcte présente les caractéristiques suivantes:

  • Chaque type de molécules est représenté par une icône
  • Chaque type d’ions dans la solution est représenté par une icône
  • Les icônes proches et désordonnées représentent des liquides
  • Les icônes proches et ordonnées représentent des solides
  • Les réactifs et les produits ne sont pas compartimentalisés.

La dernière affirmation est intégrée par les étudiants depuis leur première année secondaire, utiliser le modèle de la particule de matière pour représenter des mixtures homogènes, hétérogènes, des éléments et des composants de différents états (solide, liquide ou gazeux). La première partie du devoir s’est achevée rapidement, car les élèves arrivaient à considérer la réaction terminée lorsqu’ils ne percevaient plus de changement au niveau macro. Lors de la seconde partie, quelques étudiants voulaient représenter des espèces de forme ionique. Le professeur leur rappela que la représentation devait prendre en compte toutes les caractéristiques ci-dessus. Il conclut : « Une transformation chimique peut être considérée terminée lorsque la quantité d’un produit est constante ».

Il est nécessaire de présenter des situations expérimentales qui permettent aux élèves de reconnaitre et d’associer deux réactions chimiques opposées. Cela peut les aider à se représenter correctement les systèmes en équilibre dynamique. Une activité est réalisée par les étudiants.

On ajoute de l’eau à une solution d’alcool (isopropyle d’alcool) contenant des anions complexes de tetrachlorocobaltate. On obtient des complexes cationiques de cobalt sur-hydraté, et des anions de chloride en solution aqueuse.

Les étudiants devaient réaliser un schéma de réaction correct, réaliser la transformation chimique, et proposer une représentation micro du système dans sa phase finale. D’un point de vue empirique, le passage de la couleur bleu à rose était évident. Les étudiants n’eurent aucune difficulté à réaliser le schéma et à reconnaître qu’il y avait réaction chimique. Pour la représentation micro du système, 33% des étudiants n’ont pas tenu compte de la présence du solvant (isopropyle d’alcool). Le but de cet exercice est de reconnaitre que deux réactions sont opposées (et non d’identifier les réactions incomplètes, comme dans l’activité précédente).

Deuxième expérience : On ajoute au goute à goute dix cm3 d’une solution aqueuse de chloride de sodium au système précédent. Les étudiants devaient décrire ce qu’il se passait, proposer une représentation micro du système final et décrire le schéma de réaction. D’un point de vue empirique, le passage de la couleur bleu à rose était évident. Bien que les étudiants aient compris le changement de couleur, ils commirent des erreurs pour décrire le schéma de réaction et sa représentation micro. 38% ont compris la représentation et expliquent : « La couleur bleu est due à la formation de [CoCl4]2 » ou « Ce sont deux réactions chimiques opposées ». Après discussion, un élève suggère que les deux transformations chimiques sont opposées lorsque les réactifs d’une transformation sont les produits de l’autre, et inversement. Ce sera la conclusion générale.

Pour aider les étudiants à comprendre l’état d’équilibre chimique, un rapport d’expérience indiquait que le rendement de la transformation chimique n’était pas de 100%. Sur base des exercices précédents, les étudiants étaient capables de comprendre qu’un rendement inférieur à 100% peut être lié à la présence de deux réactions opposées qui ont la même vitesse. Une activité est réalisée par les étudiants.

Du trichloride de potassium gazeux réagit avec de la dichlorine (gaz), ce qui donne du pentachloride de phosphore gazeux. Selon un rapport d’expérience, si la transformation a lieu dans un système fermé (T=550° et P=2,2 atm), le rendement de la réaction chimique est de 80%. Les étudiants devaient décrire correctement le schéma de réaction, et dessiner une représentation micro des états initial et final. Le schéma de réaction était correct chez tous les étudiants.

75% d’entre eux ont correctement représenté l’état initial, contre 58% pour l’état final (un nombre de particules réactifs et produits comparable au rendement de la réaction). Ensuite, les élèves devaient donner trois raisons au rendement inférieur à 100%. Beaucoup pensait qu’après un certain temps l’énergie dans les particules restantes était insuffisante à engendrer une réaction. Selon d’autres, « PCl5 a continué de se former et s’est décomposé en PCl3 et Cl2 ». « Le rendement est de 80% car la réaction opposée peut avoir lieu, et donc former un autre réactif » ou « La réaction opposée PCl5 → PCl3a lieu ».

Lors de la discussion, un étudiant soutint qu’à un certain point il n’y a plus assez d’énergie. Ce à quoi a répondu un autre : « Je ne suis pas convaincu, la température est élevée et fréquente ». Le professeur a alors pu mettre en exergue que bien qu’un système soit constitué d’un petit nombre de particules,un certain nombre d’entre elles avaient toujours assez d’énergie pour activer le complexe et réagir. On demanda alors aux élèves d’expliquer pourquoi la concentration des réactifs et des produits était constante. Pendant la discussion, un étudiant a dit : « La vitesse de la réaction opposée est égale à celle de la réaction directe, pare que la concentration des réactifs et des produits est constante et que la vitesse à laquelle les réactifs se forment est égale à celle des produits ». Le professeur propose en conclusion générale :

  • A la fin d’une réaction chimique incomplète, le système ne peut plus évoluer et atteint un stade d’équilibre chimique dynamique.
  • Dans ce stade, la concentration de réactifs et de produits est constante et différente de zéro.
  • Dans ce stade, les deux réactions opposées ont lieu simultanément.

Notre but est de mettre sur pied et de tester une manière d’enseigner qui entraine la participation des étudiants. La sélection et la structuration des questions problématiques présentées aux étudiants sont basées sur une analyse historique et épistémologique du concept d’équilibre chimique, et sur les résultats de recherche didactique sur les mauvaises conceptions et sur les difficultés d’apprentissage liées au concept. Si l’on prend les réponses des étudiants lors des activités, ainsi que leur participation, l’approche didactique leur a permis d’apprendre le concept activement. Cependant, pour vérifier que la suite didactique permet aux étudiants d’éviter de mauvaises conceptions ou certaines difficultés d’apprentissage, il est nécessaire que d’autres professeurs trouvent intéressant de l’expérimenter. Le but est de l’utiliser dans un contexte scolaire. Les enseignants qui veulent l’utiliser peuvent choisir d’autres réactions chimiques mieux adaptées à leur situation de travail.

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